Défaillances cardiaques, faiblesse musculaire... La déficience en N-acétylneuraminate pyruvate lyase (NPL) entraine une maladie métabolique aux effets graves et encore méconnus. Bien qu’il n’existe encore aucun traitement de cette condition, une nouvelle étude dirigée par Alexey Pshezhetsky en étroite collaboration avec Nicolas Dumont du CHU Sainte-Justine a donné lieu à des avancées significatives dans la compréhension de son mécanisme d’action, mais également pour le développement d’un traitement potentiel qui permettrait le rétablissement des cellules musculaires.
La NPL : une enzyme essentielle au fonctionnement musculaire
Grâce à des tests réalisés sur des souris ayant la mutation répliquant la déficience en NPL, l’étude publiée le 30 juin dernier dans la revue Science Advances démontre le rôle essentiel de la NPL dans la fonction musculaire et la guérison suite à une blessure. Ainsi, la dégénérescence musculaire était associée à des anomalies dans la maturation et l’organisation des fibres musculaires, de même que dans les fonctions des mitochondries au sein des muscles, c’est-à-dire la partie des cellules produisant l’énergie. Ces anomalies étaient toutes attribuables à une déficience en NPL.
Bonne nouvelle : les chercheurs ont également démontré que l’on peut prévenir ou même renverser ces anomalies par l’administration orale d’un traitement appelé N-acétylmannoseamine. Ainsi, dans l’étude, l'administration orale de N-acétylmannoseamine à partir de la naissance a permis d’éviter la dégénérescence musculaire chez les souris ayant la mutation de déficience en NPL. Ces dernières avaient conservé une force musculaire normale à six semaines et ce, même après l’arrêt du traitement, ce qui suggère une restauration de la structure du muscle. En outre, ce même traitement a permis d’accélérer drastiquement le processus de guérison musculaire des souris ayant une déficience en NPL.
« Ces résultats préliminaires indiquent que les patientes et patients souffrant d’un déficit en NPL pourraient bénéficier d’un diagnostic rapide et de ce traitement qui permet la réduction des conséquences adverses liées à une telle condition », se réjouit Alexey Pshezhetsky, également professeur titulaire à l’Université de Montréal. Le traitement est d’autant plus prometteur qu’il a déjà été utilisé en essai clinique pour d’autres conditions, sans effet secondaire notable. L’étude soutient ainsi la nécessité de mener des essais cliniques pour vérifier l’efficacité de ce traitement chez les humains.
De gauche à droite : Nicolas Dumont, Alexey Pshezhetsky et Afitz Da Silva, premier auteur de la publication. Photo © CHU Sainte-Justine (Véronique Lavoie)
Une première étape prometteuse
L’étude démontre le rôle essentiel de la NPL dans la fonction et la régénérescence musculaires. Ces résultats sont prometteurs non seulement pour le déficit en NPL, mais aussi possiblement pour d’autres formes de dégénérescence musculaire. « Des tests supplémentaires pourront confirmer si le déficit en NPL peut être généralisé à d’autres maladies musculaires dégénératives qui touchent des milliers de personnes en Amérique du Nord et servir de biomarqueur général », souligne Nicolas Dumont, aussi professeur à l’Université de Montréal.
À propos de l’étude
L’article « N-acetylneuraminate pyruvate lyase controls sialylation of muscle glycoproteins essential for muscle regeneration and function » par Afitz Da Silva, J. Dort, S. Orfi, X. Pan, S. Huang, I. Kho, E. Heckel, G. Muscarnera, P.P. Van Vliet, L. Sturiale, A. Messina, D.A. Romeo, C.D.M. Van Karnebeek, X.-Y. Wen, A. Hinek, T. Molina, G. Andelfinger, B. Ellezam, Y. Yamanaka, H.J. Olivos, C.R. Morales, J.-S. Joyal, D.J. Lefeber, D. Garozzo, Nicolas A. Dumont et Alexey V. Pshezheztsy, a été publié le 30 juin 2023 dans Science Advances. Le financement de l’étude a été assuré par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le Réseau canadien de glycomique et le Réseau canadien sur les modèles et mécanismes des maladies rares.