MONTRÉAL, le 27 octobre 2023 - L’utilisation accrue des médias numériques par les jeunes est associée à des comportements agressifs et à de l’impulsivité, mais cet impact diffère selon le type de média et de contenu, suggèrent deux nouvelles études réalisées par Patricia Conrod, chercheuse au CHU Sainte-Justine et professeure à l’Université de Montréal. Ainsi, selon les deux études portant sur une cohorte de 3800 adolescentes et adolescents de 31 écoles du Grand Montréal suivis sur une période de cinq ans, les médias sociaux seraient associés à des effets négatifs durables sur l’agressivité et l’impulsivité, alors que d’autres types de médias auraient des effets à court terme seulement.
Médias sociaux : des effets négatifs à plus long terme
La première étude propose une modélisation statistique des données longitudinales et montre que l’utilisation des médias sociaux, des jeux vidéo et des activités liées à l’ordinateur est associée à une augmentation à court terme des comportements agressifs. Or, elle révèle également que l’utilisation des médias sociaux est durablement associée à des comportements antisociaux. À l’opposé, l’écoute de la télévision serait associée à davantage de comportements prosociaux et à une baisse des pensées négatives au fil du temps.
« Ces résultats nous permettent de penser que les contenus numériques de meilleure qualité, comme le contenu télévisuel, pourraient avoir un effet protecteur contre les comportements agressifs », précise Patricia Conrod.
Dans une deuxième étude, la chercheuse et son équipe ont constaté une relation importante entre les symptômes de trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), exprimé par des comportements impulsifs, avec l’utilisation des médias sociaux et le fait de regarder la télévision et de jouer à des jeux vidéo. Mais ici encore, l’effet négatif serait durable seulement pour l’utilisation de médias sociaux, démontré par une mesure neuropsychologique du contrôle cognitif.
« Dans l’ensemble, ces résultats indiquent que les cliniciennes et cliniciens gagneraient à tenir compte du temps passé devant un écran, en particulier sur les médias sociaux, et à cibler cet élément lors de thérapies d’atténuation de problèmes de comportement et de santé mentale chez les adolescentes et adolescents », ajoute Jasmina Wallace, stagiaire postdoctorale et co-autrice de ces études avec Patricia Conrod.
Pourquoi les médias sociaux semblent-ils plus nocifs?
« Les médias sociaux, contrairement à d’autres types d’activités devant un écran, véhiculent des messages et du contenu communiqués entre pairs, explique Patricia Conrod. Résultat : ils renforcent les normes sociales chez les jeunes. De plus, ce contenu est rarement soumis à un examen et ne comporte pas de narration complexe. Il se caractérise par le défilement rapide d’informations brèves (courtes vidéos, images, messages), ce qui nécessite peu de contrôle cognitif chez les utilisateurs. »
Pour limiter les effets nocifs de l’utilisation des médias sociaux sur les jeunes, Patricia Conrod insiste sur l’importance de la collaboration entre les entreprises derrière ces médias et les équipes de recherche afin de mieux comprendre les conséquences fonctionnelles et psychologiques des algorithmes appliqués par leurs plateformes. Une telle collaboration apparait essentielle pour trouver des solutions afin de limiter les effets nocifs des médias sociaux sur les comportements et la santé mentale des jeunes.
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