D’un unique projet de recherche clinique, il est devenu un programme multiple, qui englobe de nombreux domaines de la santé et de la médecine, tout en mettant en lumière l’importance de la perspective des patients dans la recherche scientifique. À l'occasion de la Journée mondiale de la prématurité, découvrez-le projet HAPI!
Photos de gauche © CHU Sainte-Justine (Véronique Lavoie), photo de droite © Fondation CHU Sainte-Justine (Geneviève Charbonneau)
Une croissance fleurissante
HAPI (Health of Adult Preterms Investigation) est une recherche ambitieuse et novatrice qui étudie la santé globale des adultes nés prématurément, notamment ceux nés avant 29 semaines de gestation à partir de 1987. L'objectif du projet est de mieux comprendre l'impact à long terme de la prématurité sur le développement de maladies chroniques telles que le diabète, l'hypertension et l'ostéoporose.
Initié par la Dre Anne Monique Nuyt, HAPI explore les effets à long terme de la prématurité sur la santé globale, y compris les risques de maladies cardiovasculaires, de diabète de type 2, de surpoids et de problèmes respiratoires ainsi que la santé osseuse. Pour que le projet prenne forme, cette dernière a fait équipe avec la Dre Thuy Mai Luu, une pédiatre et chercheuse spécialisée dans le suivi des enfants prématurés. Dès le départ, elles sont épaulées par Anik Cloutier, chargée de projet. La démarche a rapidement suscité de l’intérêt et pris de l’ampleur. La prématurité pouvant être abordée de manière transversale, différents secteurs du CHU Sainte-Justine ont souhaité explorer son impact sur leur propre champ d’exercice. « Le projet HAPI a éventuellement collaboré avec une très grande partie des équipes de l'hôpital : en plus de pédiatrie, il y a eu médecine nucléaire, radiologie, néphrologie, pneumologie, cardiologie, hématologie, gastroentérologie, endocrinologie… Presque tous les services ont été impliqués! », relate la Dre Nuyt.
Un projet, mais aussi des financements qui font tache d’huile
En lien avec sa grande portée, le projet a généré plusieurs financements successifs pour des équipes du Centre de recherche. Le financement initial provenait d’un donateur anonyme, que l’équipe remercie d’ailleurs chaleureusement. Cette aide précieuse a permis de lancer les premières étapes du projet. Une première cohorte de participantes et participants a été créée : 20 adultes nés prématurément et 20 adultes nés à terme. Cette première phase a été essentielle pour démontrer la faisabilité de l’étude exhaustive à laquelle les participants alors âgés entre 18 et 30 ans ont accepté de contribuer, et obtenir des résultats préliminaires prometteurs.
En 2013, après une première subvention des Instituts de recherche en santé du Canada, HAPI a connu une croissance exponentielle grâce à des financements successifs qui ont permis d'élargir l'étude et de publier plusieurs articles de recherche. En 2018, le projet était déjà reconnu comme une référence sur les effets à long terme de la prématurité, avec plus de 200 participants évalués. Ce succès a attiré de nouveaux financements, comme celui de la Fondation des maladies du cœur, qui ont permis de mener un essai clinique sur l'impact de l'exercice physique sur la santé cardiovasculaire des adultes prématurés. Parallèlement, des subventions supplémentaires et une chaire philanthropique de la Fondation du CHU Sainte Justine ont soutenu des recherches sur la santé rénale et musculaire. Une biobanque, financée avec la Chaire Developmental Origins of Health and Disease (DoHAD), a également été créée pour identifier des marqueurs liés à la prématurité. Plus récemment, un financement d'un million de dollars des Instituts de recherche en santé du Canada permettra d'explorer le rôle des cellules endothéliales progénitrices dans la réparation des vaisseaux sanguins.
Ces financements ont permis au projet de croitre et à l’équipe de bâtir sa notoriété. Comme l’indique fièrement la Dre Luu : « Avec les 100 000 $ initiaux, nous avons pu obtenir dans les 10 dernières années du financement ininterrompu, de sorte que le projet a pu générer approximativement 3M$ en fonds de recherche. Mais ce qui est peut-être plus important encore, c’est que notre équipe est devenue une référence à l’échelle internationale en recherche sur la prématurité. Au-delà des montants financiers, ces soutiens ont été un véritable levier pour des collaborations scientifiques, médicales et communautaires, renforçant ainsi la portée et l’impact de l’étude ».
L’apport précieux des participantes et participants partenaires
Le projet HAPI s'est distingué par l'implication active des participants, en les plaçant au cœur du processus de recherche en tant que partenaires égaux, une approche rendue possible grâce au travail de Camille Girard-Bock, elle-même née prématurément et aujourd'hui étudiante en médecine. Camille a dirigé un groupe de patientes et patients partenaires issus de la cohorte et conseillers qui ont guidé les recherches en fonction des préoccupations réelles des adultes nés prématurément. Ils ont également joué un rôle crucial dans des actions de sensibilisation et de prévention. Ce groupe a soulevé des questions importantes sur la perception de la santé, les objectifs de bien-être et les mesures de prévention à adopter à l'âge adulte pour limiter les risques associés à la prématurité. De cette contribution des participantes et participants partenaires est né le « Mur d'espoir », un espace situé en néonatalogie au CHU Sainte-Justine, présentant les photos et témoignages de personnes nées prématurément afin de célébrer leur résilience et l’esprit de communauté qui les unit.
Le projet HAPI est une aventure scientifique et humaine qui a évolué par-delà les frontières initiales de la recherche clinique pour devenir un véritable modèle de collaboration et d'innovation en santé. Son histoire est d'ailleurs loin d'être terminée. Tandis que de nouveaux volets de recherche et de financement prennent forme, l’équipe HAPI reste animée par la même conviction : celle que chaque avancée peut offrir un avenir plus sain aux générations à venir, en construisant, pour les adultes nés prématurément, une prise en charge mieux adaptée, plus préventive et plus humaine. Félicitations à l’équipe et longue vie à la cohorte HAPI!
Photo : une partie de la cohorte HAPI © CHU Sainte-Justine (Gracieuseté)