Centre de recherche
jeudi 4 avril 2024

La quête d’un médecin chercheur pour mieux guérir les maladies du foie

L’insuffisance hépatique aiguë (IHA) est une défaillance grave du foie souvent due à un virus ou à l’utilisation inadéquate d’un médicament. Parce qu’elle empêche l’organe d’éliminer les toxines de l’organisme, l’IHA nécessite souvent qu’une greffe de foie soit réalisée dans les plus brefs délais. Et si la greffe permet de sauver des vies, il s’agit néanmoins d’une intervention invasive qui comporte son lot de risques et de conséquences pour la personne greffée.

Le Dr Massimiliano Paganelli, hépatologue pédiatre et directeur du laboratoire de génie tissulaire et thérapie cellulaire hépatique au CHU Sainte-Justine, connaît bien la réalité des jeunes et des adultes ayant une insuffisance hépatique, lui qui en voit régulièrement en clinique. Et les défis que comportent ces cas, qui nécessitent d’intervenir extrêmement rapidement, dans des situations parfois complexes et dans un contexte de rareté d’organes disponibles.

« En cas d’insuffisance hépatique aiguë, nous n’avons que quelques jours pour effectuer une greffe de foie, mais trouver un organe compatible dans un délai très court est souvent un défi majeur, surtout quand la maladie frappe des enfants en bas âge. Je me souviens d’une jeune fille canadienne ayant présenté une IHA en Arabie Saoudite, pour laquelle elle a dû se rendre d’urgence en Europe, risquant sa vie dans le voyage. La maladie étant trop sévère pour son transfert à Montréal, elle a dû recevoir une greffe hépatique sans délai avec une portion du foie de son père. »

La jeune fille en question a survécu à la transplantation et a été ensuite rapatriée au CHU Sainte-Justine, ou elle a été prise en charge par le Dr Paganelli. Après des années, elle se porte bien, mais elle dépend de traitements continus et doit se soumettre à des contrôles périodiques. « Il faut considérer que la greffe est une chirurgie complexe, avec encore une mortalité significative, des complications assez lourdes à court et à long termes, et le besoin de prendre des médicaments immunosuppresseurs à vie, explique l’hépatologue. C’est frustrant dans le cas de l’IHA, car le foie possède une excellente capacité de régénération, ce qui lui permettrait de guérir par lui-même – si seulement on était capables de garder la personne en vie pour le temps nécessaire. »

Face à ces difficultés, le Dr Paganelli a voulu trouver une solution à la fois plus efficace et moins invasive pour ses patientes et patients. Et cette solution se trouvait du côté de la thérapie cellulaire.

Régénérer le foie grâce à des « mini-organes »

C’est ainsi qu’avec la Dre Claudia Raggi et son équipe au CHU Sainte-Justine et à l’Université de Montréal, le Dr Paganelli a réussi à mettre au point un tissu hépatique mature à partir de cellules souches. Sous l’apparence de timbres d’environ 10 centimètres de côté, ce tissu hépatique encapsulé composé de « mini-foies » et de biomatériaux novateurs peut être produit d’avance afin d’être disponible dès qu’un besoin surgit. Ce dispositif est ensuite implanté par laparoscopie dans le cadre d’une chirurgie peu invasive durant à peine 10 minutes. Et les résultats préliminaires sont stupéfiants : « Du moment qu’on l’a produit, le dispositif est aussi fonctionnel qu’un foie mature, se réjouit le médecin. Ainsi, deux heures après avoir été implanté, il prend déjà le relai de l’organe malade. Et comme les cellules sont isolées dans le dispositif, elles n’entrent jamais en contact avec le système immunitaire de la patiente ou du patient. On élimine donc le besoin de recourir à des immunosuppresseurs, nécessaires en cas de greffe, et on réduit le risque de complications. »

 « La technologie que nous avons développée à Sainte-Justine était extrêmement prometteuse, relate le médecin chercheur. Or, pour qu’une telle innovation puisse éventuellement devenir disponible pour les patients, nous devons faire la preuve que les processus sont sécuritaires et optimaux. Nous avons ainsi fondé MorphoCell Technologies en 2018, afin d’être en mesure de développer la technologie et les procédés nécessaires pour produire et réaliser des tests à plus grande échelle. Notre objectif, ça a toujours été d’aider nos patients et de sauver des vies. »

Aujourd’hui, cette thérapie cellulaire nommée ReLiver™ fait ses preuves. Les essais cliniques ont démontré qu’elle accélère la régénération du foie. Dès que ce processus est complété, le « timbre » est simplement retiré et le foie, guéri. « À terme, je suis confiant que nous serons en mesure d’éviter jusqu’à 80 % des greffes de foie chez nos patients atteints d’IHA, » se réjouit le médecin.

Innover au bénéfice des patientes et patients

« Finalement, nous avons réussi à sauver cette jeune fille hospitalisée d’urgence en Europe. Mais je me dis que si notre technologie avait été disponible à ce moment-là, nous aurions pu intervenir plus rapidement et avec moins de risque, sans même qu’il soit nécessaire de la transférer d’Arabie Saoudite, où elle aurait pu être traitée et poursuivre sa vie avec son propre foie. »

La technologie est actuellement en stade préclinique, et n’est donc pas encore disponible pour les patientes et patients. Néanmoins, les dernières nouvelles ont de quoi réjouir : l’entreprise a annoncé aujourd’hui un nouveau financement majeur de 40 millions de dollars américains provenant de fonds privés. Cet investissement permettra de terminer le développement préclinique et de réaliser la première étude clinique chez l’humain, afin de confirmer la sécurité des procédés et la possibilité d’une future implantation à l’échelle internationale. Une étude clinique sur des adultes atteints d’IHA devrait débuter en 2026, et le Dr Paganelli espère que des patientes et patients pourront bénéficier du traitement l’année suivante. Si les essais sont concluants, le souhait est d’amener cette innovation dès que possible auprès des enfants.

Pour Anne-Marie Alarco, directrice adjointe à l’innovation du CHU Sainte-Justine, cette réussite démontre l’immense potentiel d’innovation en santé de notre établissement : « Le Dr Paganelli a fait l’audacieux pari de changer les choses. S'appuyant sur son expérience de chercheur et de clinicien, il porte avec brio à travers MorphoCell la maturation d'une innovation transformative pour nos petits patients. » À plus long terme, l’ambition est d’explorer le potentiel de cette innovation pour traiter d’autres affections du foie, notamment les maladies chroniques, et même de soigner d’autres organes.

Autre source / renseignements

Personne-ressource auprès des médias

Justine Mondoux-Turcotte
Conseillère - relations médias et relations externes
CHU Sainte-Justine
514 345-7707
relations.medias.hsj@ssss.gouv.qc.ca

Personnes nommées dans le texte
À propos de cette page
Mise à jour le 4 avril 2024
Créée le 28 mars 2024
Signaler ou faire une remarque
 

Voir Grand pour l’amour des enfants

Avec le soutien de donateurs comme vous au cœur de la campagne majeure Voir Grand, nous conduisons les équipes soignantes vers les opportunités de la science et des nouvelles technologies pour que chaque enfant, où qu’il soit au Québec, accède au savoir-faire et au savoir-être uniques du CHU Sainte-Justine. Ensemble, unissons nos forces pour leur avenir.

Merci de voir grand avec nous.

Vous pouvez également faire votre don par la poste ou par téléphone au numéro sans frais 1-888-235-DONS (3667)

Nous contacter

514 345-4931

Légal

© 2006-2014 Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine.
Tous droits réservés.
Avis légaux  Confidentialité  Sécurité

Avertissement

Les informations contenues dans le site « CHU Sainte-Justine » ne doivent pas être utilisées comme un substitut aux conseils d’un médecin dûment qualifié et autorisé ou d’un autre professionnel de la santé. Les informations fournies ici le sont à des fins exclusivement éducatives et informatives.

Consultez votre médecin si vous croyez être malade ou composez le 911 pour toute urgence médicale.

CHU Sainte-Justine