Montréal, le mercredi 2 avril – Aujourd’hui, environ un enfant sur 60 reçoit un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme (TSA) au Québec. Derrière cette statistique se cachent des parcours uniques, souvent parsemés de défis. Les équipes du CHU Sainte‑Justine s'efforcent de créer un environnement de soins et de recherche adapté à ces trajectoires, en privilégiant des approches précoces et personnalisées.  

En première ligne de cet engagement se trouve la chercheuse Sarah Lippé, neuropsychologue, dont les travaux portent sur la compréhension du développement cérébral des enfants vivant avec un TSA. Depuis deux décennies, ses recherches, réalisées notamment à l’aide d’enregistrements par électroencéphalographie (EEG) et avec l'appui croissant de l'intelligence artificielle, visent à identifier des biomarqueurs cérébraux précoces, tels que des changements de l’activité cérébrale spécifiques à certains sous-groupes. Ses travaux cherchent plus récemment à étudier comment divers facteurs génétiques, environnementaux et socioculturels influencent ces marqueurs, en tenant compte des spécificités physiologiques comme le cycle menstruel et l’apparition des symptômes à la puberté, qui peuvent différer selon le sexe ou le contexte hormonal.

« Ce qui me motive tout particulièrement, c’est la possibilité d’intervenir très tôt et avec précision, grâce à une compréhension approfondie de la dynamique cérébrale spécifique à chaque enfant », explique-t-elle. « En identifiant des biomarqueurs précis, nous sommes capables non seulement de mieux comprendre les comportements des enfants, mais également de prédire leur réponse à certains traitements, optimisant ainsi l'efficacité des interventions cliniques. » 

Sarah Lippé souligne que chaque personne autiste est unique, tant dans ses défis que dans ses forces. Elle défend l’idée qu’il ne s’agit pas seulement d'adapter l'enfant à son environnement, mais aussi d’adapter l’environnement à l'enfant pour favoriser son plein épanouissement. « Adapter le contexte aux besoins spécifiques des personnes autistes permet souvent de révéler des talents exceptionnels », précise-t-elle. 

Son équipe collabore avec des partenaires locaux et internationaux, tels que le consortium européen EU‑AIMS. Ces partenariats ont notamment permis la réalisation d’études cliniques internationales visant à améliorer la médecine de précision dans le domaine de l’autisme. 

Vers une médecine neurodéveloppementale de plus en plus ciblée

Au CHU Sainte‑Justine, la santé de précision prend une dimension fonctionnelle : elle repose sur des mesures objectives comme l’EEG pour observer comment le cerveau de l’enfant fonctionne dans divers contextes, avant même qu’un traitement soit administré. Cela permet aux chercheuses et aux chercheurs d’anticiper quels enfants réagiront mieux à une intervention donnée. En d'autres termes, au lieu de réaliser une ou plusieurs interventions standardisées pour le plus grand nombre, on utilise les données du fonctionnement cérébral pour prédire et cibler celles qui pourraient être réellement bénéfiques.

« L’objectif est d'intégrer des mesures objectives comme l’EEG dans les essais cliniques pour améliorer la précision et l’efficacité des interventions », ajoute Sarah Lippé. « Actuellement, trop d’essais cliniques aboutissent à des résultats négatifs faute de pouvoir cibler précisément les sous-groupes d’enfants qui pourraient en bénéficier. Notre ambition est de changer cela. » 

À l’occasion de cette Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme, le message porté par Sarah Lippé est clair : chaque enfant mérite une approche qui respecte sa singularité. Pour concrétiser cette vision, il est essentiel de poursuivre les recherches en santé de précision pédiatrique, car c’est en affinant notre compréhension du fonctionnement cérébral que nous pourrons développer des traitements plus justes, plus rapides et véritablement adaptés aux besoins de chaque enfant. 

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