Patiente au CHU Sainte-Justine, Simone Brodeur, six ans, vient de recevoir un diagnostic du syndrome de Sanfilippo de type D (MPS IIID), une maladie neurodégénérative extrêmement rare et incurable. Une sentence implacable qui entraîne une détérioration progressive et irréversible des fonctions cognitives et motrices, réduisant considérablement l’espérance de vie des enfants qui en sont atteints. Pourtant, malgré cette réalité, Simone reste une enfant curieuse et vive, avide de moments partagés avec son frère et sa sœur.
L’élan de vie de Simone impose une évidence : agir, et vite. Bien qu’il n’existe à ce jour aucun traitement, ses parents, son équipe médicale et les chercheurs du Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine se mobilisent pour tenter de repousser les limites de la médecine dans le domaine des maladies neurodégénératives rares.
Une expertise à la fine pointe de l’innovation, au service des enfants
Les équipes du CHU Sainte-Justine sont au premier plan en termes d’avancées en génétique et en médecine de précision. Rapidement suivant l’annonce du diagnostic de Simone, une équipe multidisciplinaire composée de cliniciens-chercheurs et de chercheurs fondamentaux, avec notamment des expertises en génétique, en immunologie et en neurologie, s’est mobilisée pour explorer les meilleures options de prise en charge et accélérer le développement de nouvelles approches thérapeutiques.
« Face à une maladie aussi rare et évolutive, chaque avancée compte. Plus vite nous arrivons à adapter la prise en charge des maladies rares, plus grandes sont les chances de ralentir la progression et d’améliorer la qualité de vie de ces enfants », explique le Dr Philippe Campeau, généticien et clinicien-chercheur au Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine.
Les Drs Philippe Campeau, Élie Haddad, Fabien Touzot, Pierre Teira et Henrique Bittencourt, ainsi que les chercheurs Alexey Pshezhetsky et Anthony Flamier mettent à profit leur expertise respective afin de développer une nouvelle approche thérapeutique pour freiner, voire stopper, l’évolution de la maladie.
« La thérapie génique ouvre une nouvelle ère dans la prise en charge des maladies rares. L’objectif n’est plus seulement de ralentir la progression de la maladie, mais de corriger directement l’anomalie génétique à la source. Dans le cas précis de Simone, il s’agit de remplacer le gène codant pour l’enzyme GNS (ou N-acétylglucosamine-6-sulfatase). Cette enzyme est responsable de la dégradation de molécules dont l’accumulation devient progressivement toxique dans les cellules. Cette enzyme ne fonctionne pas chez les patientes et les patients atteints du syndrome de Sanfilippo de type D qui entraîne la destruction des tissus et des organes, principalement celle du cerveau », explique le Alexey Pshezhetsky, directeur du Laboratoire Elisa Linton pour la recherche sur la maladie de Sanfilippo au Centre de recherche Azrieli.
La thérapie génique : une approche thérapeutique innovante
Parmi les approches les plus prometteuses figure la thérapie génique, qui cible directement l’origine des maladies génétiques plutôt que leurs symptômes. Au CHU Sainte-Justine, le Dr Fabien Touzot, clinicien-chercheur en immunologie et hématologie spécialisé en thérapie génique, travaille sur des approches innovantes pour Simone et d’autres enfants affectés par une maladie rare.
« Nous préparons une approche qui consiste à corriger directement les cellules souches hématopoïétiques de l’enfant en y insérant le gène fonctionnel grâce à un vecteur lentiviral. L’objectif est que ces cellules, une fois réinjectées dans le sang, produisent durablement l’enzyme manquante et la diffusent dans tout l’organisme, y compris au cerveau. Chaque étape — de la collecte des cellules à leur modification et leur réintégration — est soigneusement optimisée pour maximiser l’efficacité du traitement tout en garantissant la sécurité des enfants », explique Dr Touzot.
L'histoire de Simone : quand le parcours d'une famille redéfinit l'avenir des soins
L'histoire de Simone dépasse son propre combat : il contribue à l’avancement des connaissances scientifiques et à l’accélération des découvertes en thérapie génique, ouvrant la voie à des traitements innovants pour d’autres enfants qui seront affectés par des maladies rares.
Pour le Dr Haddad, clinicien-chercheur en immunologie, ces avancées marquent un tournant décisif : « La thérapie génique et la médecine de précision transforment notre manière de soigner : nous ne traitons plus seulement les symptômes, nous corrigeons directement la cause, au niveau moléculaire. Ce qui relevait hier de la recherche fondamentale devient une réalité clinique, avec des approches capables de restaurer un gène déficient et de prévenir l’évolution d’une maladie avant qu’elle ne se manifeste. Au CHU Sainte-Justine, nous avons l’ambition de faire partie des centres qui développent leurs propres thérapies géniques, pour que nos patients soient parmi les premiers à en bénéficier. C’est un changement de paradigme, et ce n’est que le début de l’aventure qui nous mènera à une transformation majeure des soins. »
Grâce à l’engagement du CHU Sainte-Justine et de son Centre de recherche et avec le soutien indéfectible de sa Fondation, l’histoire de Simone s’inscrit dans un élan collectif vers une nouvelle ère en santé pédiatrique.
Un engagement qui, au-delà de son propre parcours, façonne les soins de demain pour de nombreux autres enfants atteints de maladies rares et ultra-rares. Parce que chaque vie compte et chaque avancée est un espoir de plus pour soigner les enfants de demain.