MONTRÉAL, le 17 juin 2025 – Chaque année, il arrive que des bébés manquent d'oxygène avant ou pendant la naissance, ce qui peut endommager leur cerveau - une condition médicale alors appelée encéphalopathie hypoxique-ischémique (EHI). À ce jour, l’hypothermie thérapeutique est la seule approche ayant démontré son efficacité pour limiter les dommages neurologiques engendrés par cette privation d'oxygène. Cependant, même avec ce traitement, le pronostic demeure incertain. L’un des principaux défis actuels consiste à évaluer rapidement l'étendue des dommages au cerveau afin d’anticiper le risque de séquelles ou, au contraire, la possibilité d’une récupération complète. Cette évaluation repose sur un examen d’imagerie par résonnance magnétique (IRM) effectué après la fin du traitement, vers cinq jours de vie, et pour lequel le nouveau-né fragile doit être déplacé hors des soins intensifs. Or, une récente étude dirigée par le Pr Mathieu Dehaes et la Dre Elana Pinchefsky, du Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine et de l’Université de Montréal, révèle qu’une approche combinée de techniques de neuromonitoring permet de prédire plus rapidement, sur la base de données quantitatives, l’évolution clinique à court terme de ces nourrissons et ce, sans interférer avec leur traitement.
Pour parvenir à ces résultats, l’équipe de recherche a suivi 52 bébés traités par hypothermie thérapeutique à l’unité des soins intensifs néonataux du CHU Sainte-Justine en utilisant deux technologies complémentaires : l’électroencéphalogramme (EEG), déjà couramment utilisé et qui enregistre l’activité électrique du cerveau, ainsi qu'un système de neuromonitoring optique (NIRS), capable de mesurer plusieurs indicateurs de l’oxygénation et du métabolisme cérébral. Ces outils, non invasifs et utilisables directement au chevet des bébés, évitent tout déplacement, un avantage crucial étant donné la fragilité de ces patientes et patients.
La combinaison des mesures de ces deux outils a permis d’identifier avec précision la gravité des lésions cérébrales des bébés et ce, dès le deuxième jour de traitement. « Actuellement, l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) demeure la référence pour évaluer les séquelles à long terme. Elle permet de différencier les cas normaux ou légers des cas sévères, mais elle n’est généralement réalisée qu’environ cinq jours après la naissance, explique Mathieu Dehaes. L’approche intégrée que nous proposons fournit des données beaucoup plus rapidement et ce, pour tous les niveaux de gravité. » En effet, l’ajout par l’équipe de l’analyse du métabolisme cérébral permet maintenant de différencier les cas modérés des cas normaux ou légers, ce qui représentait un grand défi en clinique.
Fruits d’un travail collaboratif impliquant notamment la Dre Anne Monique Nuyt et le Dr Ramy El-Jalbout du CHU Sainte-Justine, ces résultats prometteurs ouvrent la voie à une optimisation des protocoles de soins en néonatalogie. « Aux soins intensifs néonataux, le plus tôt est toujours le mieux, souligne Rasheda Arman Chowdhury (photo ci-contre), ancienne stagiaire postdoctorale au Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine et première autrice de l’article. Les techniques accessibles que nous avons testées offrent au personnel médical des indicateurs quantitatifs au chevet des nouveau-nés pour identifier ceux à risque d'atteintes modérées ou graves, soutenant ainsi leur prise de décision clinique. »
à propos de l'étude
Ce travail est dédié à la mémoire de la Dre Ala Birca, neuropédiatre spécialisée en neuro-néonatologie et clinicienne-chercheuse au CHU Sainte-Justine, malheureusement décédée précocement durant la réalisation de ce projet de recherche. Sa vision claire des voies que devaient prendre la recherche pour améliorer l’avenir de ces enfants, et son mentorat exceptionnel ont établi les bases de ce projet.
L’article « Electroencephalography and optical neuromonitoring predict short-term outcomes in neonates undergoing therapeutic hypothermia for hypoxic-ischemic encephalopathy » est publié par Rasheda Arman Chowdhury, Zamzam Madhi, Béatrice Desnous, Bohdana Marandyuk, Ala Birca, Ramy El-Jalbout, Anne-Monique Nuyt, Elana Pinchefsky et Mathieu Dehaes dans Scientific Reports.