MONTRÉAL, le 23 octobre 2025 - Et si un seul test pouvait à la fois contribuer au diagnostic, à la caractérisation et à l’orientation du traitement du cancer chez l’enfant — tout en permettant d’éviter des traitements toxiques ou potentiellement inutiles? C’est le pari audacieux qu’a relevé la Méta‑Plateforme de Génomique Intégrée (MPGI), sous la direction scientifique du Dr Vincent‑Philippe Lavallée, hématologue, chercheur‑clinicien et professeur au Département de pédiatrie de l’Université de Montréal. L’équipe propose une nouvelle approche novatrice de séquençage du génome complet, alliant rapidité, précision et accessibilité. Grâce à la technologie Oxford Nanopore Technologies et à l’échantillonnage adaptatif, l’équipe est maintenant en mesure de détecter une vaste gamme d’anomalies génétiques et épigénétiques en moins de 24 heures, et certaines même en moins d’une heure. Cette plateforme ouvre ainsi la voie à une prise de décision clinique accélérée, dans un contexte où chaque heure compte pour initier le bon traitement.
Le défi du diagnostic en oncologie pédiatrique
Les cancers pédiatriques, qu’il s’agisse de leucémies ou de tumeurs solides, sont souvent causés par des altérations génétiques complexes : mutations, fusions de gènes et même des modifications épigénétiques comme la méthylation, qui peut désactiver certains gènes. Le diagnostic repose actuellement sur une série de tests distincts, longs, coûteux et exigeant une quantité importante de matériel biologique — comme du sang, de la moelle osseuse ou des tissus tumoraux — dont le prélèvement est complexe et limité chez les enfants.
L’équipe scientifique propose une solution innovante : le séquençage du génome complet avec échantillonnage adaptatif. Contrairement aux méthodes classiques, cette approche lit directement l’ADN natif, sans amplification, tout en ciblant en temps réel les régions les plus pertinentes pour l’analyse du cancer. Avec un seul échantillon biologique, la machine « apprend » à reconnaître les zones d’intérêt et à les séquencer de manière préférentielle, tout en conservant une vue d’ensemble du génome. Résultat : une détection simultanée de toutes les anomalies cliniquement pertinentes, y compris celles qui échappent aux tests traditionnels.
Une technologie polyvalente et rapide
Propulsé par la Plateforme Azrieli en santé de précision pédiatrique, le projet du Dr Lavallée a été développé au sein de la MPGI, un environnement technologique dédié à l’innovation en génomique. L'étude a permis une analyse complète en moins de cinq jours des 31 échantillons étudiés. Les résultats sont impressionnants : 95 % des fusions de gènes et 94 % des mutations identifiées en clinique ont été détectées avec succès.
« Cette approche offre une grande souplesse : il suffit d’entraîner la machine à reconnaître de nouveaux gènes d’intérêt, sans qu’il soit nécessaire de modifier le protocole en laboratoire », explique le Dr Vincent‑Philippe Lavallée.
L’un des avantages majeurs de cette approche est sa capacité à générer des résultats exploitables à différentes étapes du séquençage. Dès la première heure, certaines anomalies comme les grandes altérations chromosomiques ou les profils de méthylation peuvent déjà être détectées. Puis, les fusions de gènes et les mutations clonales deviennent identifiables, permettant une orientation thérapeutique plus rapide et potentiellement plus efficace. Cette dynamique progressive offre une flexibilité précieuse pour les équipes cliniques, qui peuvent adapter leurs décisions en temps réel.
Bien que développée pour l’oncologie pédiatrique, cette méthode est transférable à d’autres domaines, comme les maladies rares ou les cancers de l’adulte. Elle peut être appliquée à différents types d’échantillons (sang, moelle osseuse, biopsies).
« Si les prochaines étapes confirment ces résultats, cette méthode pourrait être transférée vers des environnements cliniques dans les prochaines années, transformant en profondeur les pratiques diagnostiques en oncologie pédiatrique — et au‑delà. »
— Dr Vincent‑Philippe Lavallée

Une partie de l'équipe de la Méta‑Plateforme de Génomique Intégrée (de gauche à droite) : Dr Vincent‑Philippe Lavallée, Marjorie Aleman‑Alvarado, Oliver Gingras, Charlène Lawruk‑Desjardins, Philippe Gingras‑Gélinas, Nicholas Geoffrion, Séverine Landais. Absent de la photo : Niklas Dreyer © CHU Sainte-Justine
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À propos de cette étude
L'article est disponible en prépublication électronique ici.