Les corticostéroïdes administrés par inhalateur aux enfants asthmatiques pourraient freiner leur croissance, comme le suggèrent des données probantes. Deux nouvelles revues systématiques publiées dans la Bibliothèque Cochrane ciblent les effets des corticostéroïdes en inhalation sur les taux de croissance. Les auteurs ont constaté que la croissance des enfants ralentissait la première année du traitement, bien que les effets soient réduits par l’utilisation de doses plus faibles.
Les corticostéroïdes en inhalation sont prescrits comme traitements de première intention pour les adultes et les enfants atteints d’asthme persistant. Médicaments les plus efficaces pour contrôler les symptômes de l’asthme, ils réduisent le nombre de décès causés par l’asthme, les visites à l’hôpital ainsi que le nombre et la gravité des exacerbations, en plus d’améliorer la qualité de vie. Cependant, parents et médecins s’inquiètent de leur effet potentiel sur la croissance des enfants. Dans le monde, sept corticostéroïdes en inhalation sont actuellement disponibles : la béclométhasone, le budésonide, le ciclésonide, le flunisolide, la fluticasone, la mométasone et la triamcinolone. Le ciclésonide, la fluticasone et la mométasone représentent les médicaments les plus récents et, théoriquement, les plus sûrs.
La première revue systématique a porté sur 25 essais visant 8 471 enfants âgés d’au plus 18 ans, atteints d’asthme persistant léger à modéré. Ces essais ont étudié tous les corticostéroïdes en inhalation disponibles, à l’exception de la triamcinolone. Ils ont démontré que, globalement, ils freinaient les taux de croissance en comparaison avec des placebos ou des médicaments non stéroïdiens. Quatorze essais, visant 5 717 enfants, ont effectué le suivi de la croissance au cours d’un an. Le taux de croissance moyen, environ 6 à 9 cm par année dans les groupes témoins, a été réduit d’environ 0,5 cm dans les groupes recevant le traitement.
«Les données probantes que nous avons examinées permettent de penser que les enfants traités quotidiennement à l’aide de corticostéroïdes en inhalation risquent de grandir d’environ 0,5 cm de moins au cours de la première année du traitement, explique l’auteur principal de la revue, Linjie Zhang, de la Faculté de médecine de l’Université fédérale du Rio Grande, au Brésil. Cet effet est toutefois moins prononcé les années suivantes, n’est pas cumulatif et semble mineur comparé aux bienfaits connus des médicaments pour contrôler l’asthme et assurer une pleine croissance des poumons.»
Pour la seconde revue, les mêmes auteurs, en collaboration avec deux autres collègues, ont passé en revue les données de 22 essais dans le cadre desquels des enfants ont été traités à l’aide de corticostéroïdes en inhalation à petites ou moyennes doses. Ces essais ont porté sur différentes doses de tous les médicaments, à l’exception de la triamcinolone et du flunisolide. Seulement trois essais ont suivi 728 enfants pendant au moins un an; parmi ceux-ci, un a testé trois différentes doses. Dans le cadre des trois essais, la diminution de la dose de corticostéroïdes d’environ une inhalation par jour a amélioré la croissance de 0,25 cm la première année.
Les chercheurs ont constaté que le ralentissement de la croissance variait selon les études. Ils ont donc cherché les liens entre une variété de facteurs et leurs effets sur la croissance. Les écarts pourraient s’expliquer en partie par les médicaments utilisés, mais comme il s’agissait d’une comparaison indirecte, les auteurs précisent que des données supplémentaires sont nécessaires. «Les conclusions sur la supériorité d’un médicament par rapport à un autre devraient être confirmées par de nouveaux essais qui compareraient directement les médicaments», affirme M. Zhang.
Selon les chercheurs, des essais à plus long terme et comparant différentes doses s’imposent aussi, en particulier chez les enfants atteints d’asthme sévère et nécessitant des doses élevées de corticostéroïdes en inhalation. «Seulement 14 % des essais étudiés ont surveillé systématiquement la croissance pendant plus d’un an. Ce facteur est grandement préoccupant en raison de l’importance de ce sujet, précise Francine Ducharme, l’un des auteurs des deux revues et auteure en chef de la seconde, du Département de pédiatrie de l’Université de Montréal, au Canada. « Nous recommandons l’utilisation de la dose thérapeutique minimale chez les enfants asthmatiques jusqu’à ce que de nouvelles données sur les doses soient disponibles. La croissance devrait faire l’objet d’un suivi attentif chez tous les enfants traités à l’aide de corticostéroïdes en inhalation, et il en va de même pour tous les futurs essais sur ces médicaments administrés aux enfants.»
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