MONTRÉAL, le 20 décembre 2018 – Une collaboration internationale codirigée par le CHU Sainte-Justine, l’Hôpital St. Michael de Toronto, le BC Children’s Hospital à Vancouver et le Centre universitaire médical Radboud aux Pays-Bas a permis de démontrer qu’une nouvelle maladie génétique rare causée par des mutations dans le gène NPL (N-acétylneuraminate pyruvate lyase) est responsable de maladies musculaires et cardiaques. Ce travail a été publié aujourd'hui dans la prestigieuse revue JCI Insight.
«Ce travail a été rendu possible grâce à la collaboration de nombreux experts du monde entier», a déclaré le Dr Xiao-Yan Wen, directeur du Zebrafish Centre for Advanced Drug Discovery à l’Hôpital St. Michael.
La Dre Clara van Karnebeek, pédiatre et généticienne biochimique au BC Children's Hospital, et ses collègues du Centre for Molecular Medicine and Therapeutics et de l’Université de la Colombie-Britannique, ont identifié une famille présentant une maladie cardiaque et certains symptômes neuromusculaires, ainsi qu'une augmentation marquée de leurs niveaux d'acide sialique. L'acide sialique est un sucre qui aide les cellules à communiquer entre elles.
Grâce au séquençage du génome entier du trio enfants-mère-père, la Dre Maja Tarailo-Graovac a pu déceler des mutations dans le gène NPL de la fratrie. Cette dernière, qui travaille maintenant à l'Université de Calgary, est une experte des approches de séquençage à haut débit et de leurs applications pour la découverte de nouveaux gènes responsables de maladies et de mécanismes génétiques.
Comme une seule famille de patients porteurs de cette mutation a pu être identifiée, l'équipe a cherché l’équivalent dans diverses cohortes de patients, puis a travaillé avec des modèles précliniques pour valider les effets de cette mutation génétique très rare à plus grande échelle.
Le Dr Wen, chef de file mondial en recherche sur le poisson-zèbre, a reproduit la constitution génétique des deux frères et sœurs chez le vertébré et a confirmé qu'une altération du gène NPL chez le poisson-zèbre entraînait des problèmes musculaires et cardiaques, comme chez l'homme.
Fait important, son laboratoire a testé de nombreuses options de traitement de la maladie en utilisant divers métabolites - substance organique finale transformée par le métabolisme - chez les poissons-zèbres atteints de la mutation NPL. Son équipe a identifié des sucres (également appelés monosaccharides ManNAc et GlcNAc) spécifiquement formés à partir du métabolisme de l’acide sialique qui pourraient potentiellement être utilisés pour traiter cette maladie génétique.
«Tout d’abord, c’est une grande découverte : personne n’avait auparavant associé ce gène à la myopathie musculaire», a déclaré le Dr Wen, qui est également chercheur au Centre de recherche Keenan pour les sciences biomédicales à l’Hôpital St. Michael. «Deuxièmement, cela pourrait signifier de meilleures options de traitement pour les patients atteints d'un déficit en NPL à l'avenir.»
Le Pr Dirk Lefeber aux Pays-Bas dirige le Centre d’expertise Radboudumc sur les troubles de la glycosylation et est expert en anomalies du métabolisme du sucre. Son équipe a étudié les métabolites du sucre dans les cellules des patients et a constaté une nette réduction des métabolites de l’acide sialique dans les globules rouges, tandis que des taux normaux ont été retrouvés dans les cellules de la peau.
«Pour la première fois, cela a montré l’importance de la dégradation de l’acide sialique pour la physiologie du muscle humain et mis en évidence les sucres pouvant être utilisés pour des études thérapeutiques», précise le Pr Lefeber.
Le Pr Alexey Pshezhetsky au Centre de recherche du CHU Sainte-Justine et à l'Université de Montréal est un expert en biologie de l'acide sialique. Son groupe a établi l'effet des mutations identifiées sur l'enzyme NPL. Actuellement, ils travaillent sur la caractérisation d’une lignée de modèles précliniques ayant des mutations dans le gène NPL identiques à celles rencontrées chez les patients.
«Nos données préliminaires confirment que les modèles précliniques présentent, comme chez les patients, une faiblesse musculaire», a déclaré le Pr Pshezhetsky, «nous attendons avec impatience de voir comment ils réagiront au traitement».
Les Drs Wen, van Karnebeek, Lefeber et Tarailo-Graovac ont déjà montré que la synthèse de l’acide sialique par une enzyme différente est importante pour le développement du cerveau et du squelette. Ce travail a été publié dans Nature Genetics il y a deux ans. Les travaux conjoints des équipes de recherche démontrent l’importance du métabolisme de l’acide sialique pour la santé humaine et les maladies.
«Le travail entre équipes multidisciplinaires et patients-partenaires est essentiel pour parvenir à ce type de découvertes», conclut la Dre van Karnebeek, qui travaille maintenant au Amsterdam University Medical Center. «Nous devons poursuivre nos recherches afin d’améliorer le devenir des patients grâce à un diagnostic précoce et l’identification de cibles thérapeutiques.»
À propos du Centre de recherche du CHU Sainte-Justine
Le Centre de recherche du CHU Sainte-Justine est un établissement phare en recherche mère-enfant affilié à l’Université de Montréal. Axé sur la découverte de moyens de prévention innovants, de traitements moins intrusifs et plus rapides et d’avenues prometteuses de médecine personnalisée, il réunit plus de 200 chercheurs, dont plus de 90 chercheurs cliniciens, ainsi que 500 étudiants de cycles supérieurs et postdoctorants. Le centre est partie intégrante du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, le plus grand centre mère-enfant au Canada et le deuxième centre pédiatrique en importance en Amérique du Nord. Détails au recherche.chusj.org