MONTRÉAL, 2 octobre 2019 – Selon une étude menée par Anick Bérard et publiée en ligne dans BMJ Open, la prise d'antidépresseurs en attendant un enfant est associée à un risque accru de développer un diabète spécifiquement lié à la grossesse, appelé diabète gestationnel.
Le risque le plus élevé concernait les mères prenant de la venlafaxine, un type de médicament appelé inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSN), et l'amitriptyline, qui appartient à une classe d'antidépresseurs plus ancienne, appelée tricyclique, comme l'indiquent les résultats.
Le diabète gestationnel touche jusqu'à une femme enceinte sur cinq dans le monde. Ces grossesses sont sujettes à des complications, telles qu’un surpoids chez le bébé et un travail prolongé durant l’accouchement en raison du bébé coincé dans le canal génital.
Ces mêmes enfants peuvent également être plus vulnérables à l'obésité et au diabète plus tard, tandis que les mamans sont plus susceptibles de développer un diabète de type 2 et une maladie cardiovasculaire.
Les recherches antérieures sur le lien potentiel entre l'utilisation d'antidépresseurs et le risque de diabète gestationnel se sont avérées peu concluantes et ont été entravées par la conception de l'étude, affirment les chercheurs.
Ils ont tiré des informations de la cohorte de grossesse du Québec, qui comprend trois bases de données canadiennes et comprend toutes les grossesses et les enfants nés au Québec entre 1998 et 2015.
Chaque cas de diabète gestationnel (20 905), identifié après 20 semaines de grossesse, a été associé au hasard à 10 grossesses non affectées (209 050) du même âge et de la même année calendaire d'accouchement.
L'utilisation d'antidépresseurs a été évaluée à l'aide d'informations sur les ordonnances remplies pour ces médicaments entre le début de la grossesse et le diagnostic de diabète gestationnel. Au total, 9741 (un peu plus de 4 %) des mères ont pris des antidépresseurs, seuls ou en association.
Ceux-ci comprennent le citalopram, la fluoxétine, la fluvoxamine, la paroxétine et la sertraline, qui appartiennent à une classe de médicaments appelés inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, ou ISRS pour faire plus court; la venlafaxine; et l'amitriptyline.
Après avoir pris en compte des facteurs potentiellement influents, tels que l’âge de la mère, l’aide sociale, le lieu de résidence et d’autres affections sous-jacentes, la prise d’antidépresseurs pendant la grossesse a été associée à un risque accru de diabète gestationnel.
La prise d’un de ces médicaments était associée à un risque accru de 19 % d’être diagnostiquée, par rapport au fait de ne pas prendre d’antidépresseurs pendant la grossesse.
Le risque le plus élevé était associé à deux antidépresseurs, notamment: la venlafaxine (27 % de risque accru); et l'amitriptyline (52 % de risque accru).
Également, plus certains types d’antidépresseurs sont utilisés, notamment les IRSN et les tricycliques, seuls ou en association, plus le risque augmente,
L'utilisation à court terme était associée à un risque accru de 15 %; l'utilisation à moyen terme était associée à un risque accru de 17 %; et utilisation à long terme avec un risque accru de 29 %.
Lorsque des analyses supplémentaires ont été effectuées sur un groupe plus restreint de femmes (21 395) chez lesquelles on avait diagnostiqué une dépression ou de l’anxiété avant de devenir enceinte, les résultats étaient similaires à ceux de l'analyse principale.
Il s’agit d’une étude d’observation qui ne permet pas d’établir la cause. Mais il y a des explications possibles à ce qu'ils ont trouvé, affirment les chercheurs.
Cela inclut le fait que les antidépresseurs agissent directement sur le métabolisme du glucose, en particulier du fait que la sérotonine est impliquée dans ce processus. Et l'un des effets secondaires des antidépresseurs est la prise de poids, facteur de risque du diabète.
Mais il faut peser avec soin les avantages et les inconvénients de la prise d'antidépresseurs pendant la grossesse, préviennent les chercheurs, en particulier pour les femmes souffrant de dépression grave.
« Le traitement de la dépression est une préoccupation majeure et pose des problèmes, car la dépression sévit avant et pendant la grossesse, et une dépression non traitée peut entraîner une rechute pendant la grossesse et dans la période qui suit immédiatement la naissance », soulignent-ils.
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