Montréal, le 5 mars 2020 – C’est avec autant de fierté que d’émotion que le CHU Sainte Justine (CHUSJ) souligne que 1 000ème greffe de moelle sera réalisée la semaine prochaine chez un enfant, dans ce cas une jeune fille de 12 ans.
Derrière ce jalon très symbolique se décline une aventure humaine et médicale qui a débuté en 1993 à Sainte-Justine et a vu la greffe évoluer autant dans ses méthodes de traitements que dans son usage.
«Le travail constant des équipes pour parfaire ce qui était à l’origine une technique très nouvelle, afin d’en améliorer l’efficacité pour le bien-être des jeunes patients a porté fruit et nous en sommes très fiers»
a déclaré madame Caroline Barbir,
présidente-directrice générale du CHU Sainte-Justine
Bref regard sur 27 années de greffes de moelle
Au cours de ses 27 années d’existence, le programme de greffe a en effet connu de profonds changements qui ont transformé les soins apportés aux enfants et la promesse d’une vie meilleure portée par la greffe.
Durant ses deux premières années d’existence, la greffe à Sainte Justine était confinée aux greffes autologues, c’est à dire à partir de la propre moelle du patient. Puis, en 1995, sont venues les premières greffes avec des frères et sœurs compatibles, suivies rapidement par la première greffe avec un donneur de registre international en 1996.
En un quart de siècle, la quête d’un donneur pour tous les patients et la possibilité d’un donneur universel sont devenues l’idée fixe des médecins et des familles. Grâce à la mobilisation internationale, les registres de donneurs se sont grandement enrichis de personnes d’origines diverses permettant d’augmenter les chances d’avoir un donneur à près de 90% pour les caucasiens et près de 50% pour les personnes d’autres origines. Parallèlement, la médecine a fait de formidables progrès dans l’utilisation de donneurs non compatibles. Ainsi, il est devenu possible d’utiliser le sang présent dans le placenta des nouveaux nés, sang habituellement jeté avec le placenta après l’accouchement, pour effectuer des greffes de moelle.
Le CHU Sainte-Justine a toujours été en proue de cette quête d’un donneur. La première greffe de sang de cordon a eu lieu en 1997 et a rapidement pris une grande importance jusqu’au début des années 2010. Puis, ce sont les greffes avec donneurs de fichiers internationaux qui ont pris le relai du fait de l’amélioration des greffes avec ce type de donneur.
La première greffe avec un des parents a eu lieu en 2001, mais cela est resté rarement utilisé jusqu’en 2016, date à laquelle de nouveaux protocoles de greffe ont amené une grande amélioration avec ce type de donneur.
L’espoir croissant d’une guérison
Pendant longtemps, l’espoir d’une greffe et d’une guérison sont demeurés des buts différents qui se côtoyaient en permanence sans jamais se confondre. Pour les enfants atteints de cancer ou de leucémie, représentant 50% des enfants greffés, l’espoir de guérison était lourdement assombri par la peur bien réelle du retour de la maladie après la greffe. Il y avait aussi le danger que la greffe elle-même emporte l’enfant, du fait de la toxicité des chimiothérapies ou radiothérapies préparatoires à la greffe, ou des complications infectieuses durant les premières semaines avant que les défenses immunitaires se reconstituent.
Ainsi, durant les premières années du programme de greffe à Sainte Justine, on comptait seulement de 40 à 50% de chance de survie et de guérison. Même si ces chiffres étaient effrayants, la greffe restait le seul espoir de survie pour ces patients. Au cours de ces 25 dernières années, plusieurs évolutions sont venues améliorer le devenir des enfants greffés.
- En 2002, la première injection de lymphocytes du donneur fut effectuée à Sainte Justine pour tenter de combattre des rechutes de cancer après greffe.
- En 2010, les premiers traitements de la maladie de la greffe contre le patient par utilisation de cellules souches mésenchymateuses furent tentées avec succès à Sainte Justine, transformant le pronostic de survie des enfants atteints des formes sévères de cette complication.
- En 2011, de nouveaux protocoles de préparation à la greffe avec des doses diminuées de chimiothérapie furent introduites pour les enfants greffés pour maladie non cancéreuse.
- En 2012, l’hôpital Sainte-Justine a mis en place une nouvelle technologie de détection précoce des rechutes de leucémies après greffe, afin de détecter une rechute le plus tôt possible et de pouvoir la traiter par activation du système immunitaire de la greffe contre les cellules leucémiques.
- Dans le même temps, de nouveaux traitements pour mieux détecter et mieux traiter les infections se sont développés.
Toutes ses améliorations, combinée à l’expérience des soignants, ont permis de faire reculer grandement les risques de décès par complications de la greffe qui sont maintenant de 10% et moins pour les maladies cancéreuses et de 5% et moins pour les maladies non cancéreuses. Il n’en reste pas moins que le risque de retour du cancer reste toujours très présent, emportant un enfant sur trois greffé pour leucémie ou cancer.
Tout au long de ces années, les enfants greffés et leurs familles n’ont jamais avancé seuls. Ils ont toujours été soutenus par la générosité sans faille de la population québécoise à travers la Fondation Charles Bruneau, la Fondation Sainte-Justine et la Fondation Leucan.
Vers l’avenir
Aujourd’hui, le service de greffe de moelle de Sainte-Justine entame une nouvelle partie de son histoire. En 2015, le vieux rêve de pouvoir utiliser les cellules immunitaires pour attaquer les cellules du cancer sans attaquer les cellules saines du patient est devenu une réalité grâce à la technologie lymphocytes T avec récepteur chimérique (ou CAR selon l’acronyme anglais), qui consiste à introduire dans les cellules immunitaires (lymphocytes T), un nouveau gène qui va apporter à ces cellules la capacité de reconnaitre et attaquer spécifiquement les cellules cancéreuses.
Cette thérapie n’est pour le moment destinée qu’aux patients atteints de leucémie lymphoblastiques B, mais l’avenir devrait apporter de tels CAR pour de très nombreux types différents de cancer. Depuis 2019, il est désormais possible de quasiment supprimer le risque de maladie de la greffe contre le patient. Enfin, pour certaines maladies du sang non cancéreuses, l’arrivée des thérapies géniques est porteuse d’espoir.
Alors que nous fêtons la 1 000ème greffe du service pour une jeune fille atteinte d’une maladie des globules rouges greffée grâce à son petit frère, nous rendons grâce pour le chemin parcouru depuis 1993. Nous voulons remercier les familles pour leur confiance, les équipes soignantes pour leur dévouement et à travers l’hôpital Sainte Justine et les différentes Fondations, le Québec pour son engagement à offrir toujours les meilleurs soins possibles à ses enfants.
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À propos du CHU Sainte-Justine
Le Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine est le plus grand centre hospitalier mère-enfant au Canada. Il est membre du grand réseau d'excellence en santé de l'Université de Montréal (RUIS). Il compte 5 457 employés dont 1 532 infirmiers et infirmières auxiliaires et 1 000 professionnels en soins, 520 médecins, dentistes et pharmaciens, 822 résidents et plus de 204 chercheurs, 411 bénévoles, 4 416 stagiaires et étudiants de toutes disciplines. Le CHUSJ comprend 484 lits dont 67 au Centre de réadaptation Marie Enfant (CRME), seul centre dédié exclusivement à la réadaptation pédiatrique au Québec. L'OMS a reconnu le CHU Sainte-Justine « Hôpital promoteur de santé ».