Entamer un doctorat implique de poursuivre ses études à un moment de la vie où certaines et certains d’entre nous commencent à réfléchir à la possibilité de fonder une famille. Pour plusieurs « doctorat » et « bébé » sont totalement incompatibles, autant sur le plan professionnel que financier.
J’ai eu la chance d’avoir mon premier enfant lors de mon avant-dernière année de doctorat. Grâce au soutien d’une bourse doctorale des IRSC, j’ai bénéficié d’un congé de maternité d’un an financé par l’organisme, ce qui a permis une certaine stabilité financière malgré l’arrivée d’un bébé.
Dans mon cas, ce n’était d’abord pas dans mes plans, mon but étant de me concentrer sur mon projet. Éventuellement, l’idée d’avoir un enfant s’est présentée puis installée pour de bon. Sachant que je pouvais bénéficier du congé parental des IRSC, le stress relié à l’aspect financier a été moindre. Par contre, j’avais de la difficulté à m’imaginer hors du laboratoire pendant une année entière – qu’allait-il se passer avec mon projet! – et surtout, j’anticipais la réaction de mon superviseur.
Discuter avec lui très tôt de cette éventualité a permis d’éliminer beaucoup d’incertitudes et de monter un plan réaliste pour que la pause engendrée par mon congé de maternité ne soit pas un obstacle à l’obtention de mon doctorat. La communication et le soutien de mon superviseur dans ce projet « extrascientifique » ont été inestimables. L’ouverture sur une grossesse probable nous a permis de planifier les expériences et les priorités pour les mois avant mon congé, pour éviter que mon départ n’affecte trop la progression du projet. Sur le plan personnel, cela m’a enlevé beaucoup d’angoisse sur le fait « d’abandonner » mon projet pendant un an.
Après mon année d’arrêt, le retour au laboratoire a été plus difficile qu’anticipé. En plus du fait qu’il y avait beaucoup de nouveaux étudiants, et donc une dynamique de laboratoire différente d’avant mon congé, je devais aussi planifier mon horaire en fonction de ma famille. Moi qui aimais arriver très tôt et qui pouvais passer 12 heures par jour au laboratoire, je devais maintenant prendre en considération l’horaire de la garderie, et être en mesure de passer du temps avec ma fille.
Lors de mon retour, j’ai aussi réalisé que malgré le fait que je restais impliquée dans le laboratoire, j’avais « décrochée » plus que ce que je croyais au cours de mon année d’arrêt. J’ai dû faire un peu de rattrapage pour me remettre à jour sur la littérature et les nouveaux développements en lien avec mon projet. Ayant en tête un plan précis pour la date de soumission de ma thèse et ce que je souhaitais y inclure, j’ai fait le choix de sacrifier quelques fins de semaine avec ma famille pour me consacrer entièrement à l’écriture de ma thèse et respecter les délais que je m’étais moi-même fixés. Heureusement, ma famille et mes proches m’ont offert un soutien indéfectible dans cette période plus difficile pour la conciliation du travail et de la famille. À travers cela, j’ai dû apprendre à balancer mon côté « workaholic » avec le besoin de passer du temps en famille. Cet apprentissage me sert encore aujourd’hui dans ma vie professionnelle.
En somme, je considère que le fait de fonder une famille pendant mon doctorat a été l’une des meilleures décisions que j’ai prises. Cela m’a fait vivre des moments familiaux et professionnels inoubliables, dont des congrès scientifiques et plusieurs activités de laboratoire accompagnés de ma famille. Le moment dont je reste le plus fière jusqu’à présent est d’avoir eu ma fille avec moi lors de ma défense de thèse l’an dernier.
J’espère vous avoir démontré qu’avec une bonne communication et beaucoup de planification « doctorat » et « bébé » sont des mots tout à fait compatibles.